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  • Jeanne Chauvin

Vous connaissez mon attachement à vouloir accorder aux femmes tout l’honneur qu’elles méritent, dans notre société encore trop machiste, selon moi. J’assume pleinement mon côté « féministe » : j’ai grandi avec une mère et quatre sœurs, étudié dans des classes et amphis composés majoritairement d’étudiantes et mon premier vrai travail fut téléconseiller dans un centre d’appels, où, vous le savez sans doute, les salariées sont surreprésentées.

Toutes ces expériences m’ont permis de constater à la fois, la place essentielle qu’elles occupent dans notre quotidien, mais aussi la faible reconnaissance que les hommes leur apportent.

Ma vision du féminisme ne consiste pas à « renverser la table » et remplacer tous les dirigeants par des dirigeantes, car on tomberait à nouveau dans un rapport de force. C’est plutôt un rapport d’égalité qu’il faut enseigner, valoriser et promouvoir. Souvenons-nous : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits », selon la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Et pourquoi ne pas rajouter « l’homme est l’égal de la femme » ?

Heureusement, les choses bougent, trop lentement, certes, mais il ne faut rien lâcher !

C’est pourquoi j’ai décidé de rendre hommage à des femmes pionnières dans leur domaine. Elles ont marqué leur époque, notamment grâce à leurs compétences, leurs inventions, leurs idées, mais également grâce à l’abnégation dont elles ont fait preuve, face aux obstacles, critiques et moqueries que les hommes -et donc la société- ont dressés sur leur chemin.

Ce mois-ci, j’ai choisi de vous parler d’Olga Petit et Jeanne Chauvin, qui sont les deux premières femmes françaises à prêter serment comme avocate au barreau de Paris, respectivement les 5 et 19 décembre 1900. C’est grâce à une loi promulguée la même année par Raymond Poincaré et René Viviani, à la suite, il est vrai, de fortes pressions d’associations féministes, qu’elles ont pu accéder cette fonction tant convoitée et méritée. Jeanne Chauvin sera la première à plaider en 1901. Elle s’était déjà présentée en 1897 à la cour d’appel de Paris pour prêter le serment d’avocat, en vain. À l’époque, le motif du refus fut que la loi n’autorisait pas les femmes à exercer « la profession d’avocat, exercice viril par excellence ». « Viril », dites-vous ? Étrange qualificatif pour un métier où ces messieurs sont censés plaider vêtus d’une robe…

En tout cas, la ténacité de cette jeune Loirétaine, titulaire de deux licences en droit et en philosophie, -fait très rare, à l’époque- a été payante. Elle va ensuite consacrer sa vie et ses plaidoiries à défendre l’égalité juridique entre les hommes et les femmes. Et en hommage à tous ses combats, la bibliothèque de la faculté de droit de l’université Paris-Descartes porte son nom depuis 2017.

Jeanne Chauvin et Olga Petit auront tracé la voie à d’autres illustres avocates qui œuvreront sans relâche pour défendre « des causes et les femmes », à l’image de Monique Antoine-Timsit et Gisèle Halimi, figures du féminisme et activistes pro IVG. Christine Lagarde, avocate d’affaires, est la première femme à diriger le Fonds monétaire international puis la Banque centrale européenne, des institutions à forte représentation masculine. Et que dire de Christiane Féral-Schuhl, qui est à la tête du barreau de Paris depuis 2012 ! Dans son livre « Ces femmes qui portent la robe » (Éditions Plon), le Bâtonnier de Paris -sa fonction n’a pas été encore féminisée- liste les portraits d’avocates célèbres qui utilisent le droit et la justice, partout dans le monde, pour faire respecter les droits des hommes et des femmes, parfois au péril de leur vie.

Une chose est sûre : les confrères parisiens de Jeanne Chauvin n’auraient pas imaginé une seconde qu’une femme serait à la tête de leur profession, près de 120 ans plus tard. Une belle revanche, non ?

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Vous vous souvenez du confinement de ce printemps ? Ça nous semble tellement loin, n’est-ce pas ? À l’époque, chacun l’a vécu de façon plus ou moins « agréable », selon qu’il était seul ou en famille, dans un appartement ou une maison, avec ou sans balcon, terrasse ou jardin, en ville ou à la campagne, avec ou sans Internet. Bref, de petits détails quotidiens ont finalement pris une importance capitale (je ne parle pas du papier toilette) pour faire face à cette mesure de sûreté publique.

Notre famille l’a plutôt bien vécu : la benjamine (10 ans) a passé son temps dans le jardin, le long de la clôture, à refaire le monde avec sa voisine et camarade de classe. Elles se sont adonnées aux joies de la poterie artisanale, avec quelques séances de trampoline à distance, en guise de « pause ».

« L’école à la maison », en revanche, fut moins distrayante, pour elle, comme pour nous, parents. Mon épouse, plus patiente, a tenu bon, tant bien que mal, et pour cela, je lui tire mon chapeau. Comme pour beaucoup de parents, il est plus facile d’élever et d’éduquer un enfant que de lui enseigner les maths ou le français, si si. Heureusement, sa grande sœur (13 ans) fut plus autonome, maîtrisant parfaitement les interactions digitales établies entre son collège et les familles. Permettez-moi donc de rendre hommage à l’ensemble du personnel éducatif pour tout le travail qu’il accomplit, pour cet engagement inébranlable, ce sacerdoce.

Ma mère, en visite chez nous depuis début mars (elle vit habituellement en région parisienne) a apprécié ce séjour au grand air, loin de la pression urbaine courbevoisienne, compte tenu de sa santé fragile (diabète). Quant à ma femme et moi, pas de bouleversement : elle a travaillé normalement, comme d’autres professions « essentielles », tandis que je peaufinais la communication numérique et marketing d’Ortho Facile, depuis la maison (merci la webcam !).

Au sortir de cette période plus ou moins éprouvante, nous redoutions un relâchement libérateur, peut-être pour certains, mais sans doute irresponsable, pour d’autres. Ce comportement schizophrénique, hélas bien franco-français, nous conduisait tout droit vers un reconfinement. Les nombreuses mises en garde de soignants, experts et responsables politiques (certains ont été plus responsables que d’autres), n’ont pas suffi, face au besoin irrépressible de liberté et de divertissement d’une partie de la jeunesse, à l’envie de recréer un lien social autour d’un bon repas en famille ou entre amis. Bref, revivre !

Sauf que, certains ont estimé qu’ils pouvaient se lâcher, faire abstraction des gestes barrières et replonger dans le monde d’avant.

Les mouvements de frondeurs, pour ne pas dire complotistes, qui ont fleuri dans les médias et sur les réseaux sociaux, n’ont pas incité à la responsabilisation de la population. Et ce qui devait arriver arriva. Cette deuxième vague est en train de submerger le pays, l’Europe, une partie du monde, avec son décompte macabre que beaucoup souhaitent minimiser, en la comparant aux autres fléaux qui frappent la planète à longueur d’année (cancer, accidents de la route, famines, paludisme, grippe saisonnière, etc.). D’autres pointent les errements « coupables » des autorités, incapables, selon eux, de prendre les bonnes décisions et de trouver la solution miracle.

Si ces points de vue sont compréhensibles, jusqu’à une certaine limite, ils ne peuvent justifier cette défiance qui conduit à mettre en danger la vie des autres, en bravant couvre-feu, puis confinement ou en refusant de porter le masque. De notre côté, nous nous sommes efforcés de maintenir la vigilance. Ma mère est retournée à Courbevoie fin mai car la situation sanitaire s’était améliorée.

Durant nos vacances estivales puis automnales en région lyonnaise, nous avons restreint nos déplacements (heureusement que le géocaching se pratique principalement en extérieur) et rencontré un minimum d’amis. Seule « entorse » à cette rigueur : une journée dans un parc d’attraction en Isère. Le masque était obligatoire à partir de 11 ans. Qu’importe, nous avons expliqué à notre plus jeune fille l’intérêt de réduire les risques. Elle l’a donc porté aussi, et en permanence. Et vous savez quoi ? Aucun de nous ne s’en est plaint. Je dis ça, je dis rien… Même si le parc n’était pas bondé, des vigiles plutôt zélés n’ont pas manqué de rappeler à l’ordre les petits malins contrevenant aux règles sanitaires. Preuve en est que, des manifestations peuvent avoir lieu en extérieur, avec un public limité certes, mais au prix d’une organisation rigoureuse et stricte. En l’occurrence, celui qui refusait de porter le masque prenait le risque de se voir refuser l’accès à l’attraction, voire se faire exclure du parc.

Au risque de heurter certains défenseurs de la culture qui, à juste titre, réclament des adaptations aux restrictions en vigueur, j’imagine mal un surveillant posté dans chaque salle de cinéma ou de théâtre qui serait chargé de faire la police à chaque incident. « Arrêtons d’infantiliser les Français ! Ils sont parfaitement responsables. », vous diront-ils. Permettez-moi d’en douter.

Quoi qu’il en soit, le soir de l’annonce du reconfinement, nous avions jugé utile de faire revenir ma mère « au vert », même si la situation dans le Var était devenue bien plus inquiétante qu’au mois de mars. La suite, je vous la raconte étape par étape.

Ma mère est arrivée le vendredi 30 octobre en TGV. Environ 45 minutes de trajet entre la gare et la maison. Nous avons commis l’erreur de retirer nos masques dans la voiture, chacun pensant, sans doute à tort, que l’autre était sain. Le mardi suivant, le 3 novembre, un vent de panique a soufflé dans la maison lorsque mon épouse a commencé à ressentir des nausées et une grosse fatigue accompagnée de fièvre. Rendez-vous pris pour un test le lendemain.

Dès lors, elle s’est isolée du reste de la famille et, par sécurité, nous avons décidé de nous faire tester aussi, mais il nous a fallu patienter 48 heures pour cela. Bizarrement son état s’est sensiblement amélioré dès le mercredi, tandis que l’état de forme de ma mère s’est peu à peu dégradé. La petite toux qu’elle a ramenée de son voyage s’est amplifiée, accompagnée d’une fatigue qui l’a clouée au lit du matin au soir. De mon côté, j’ai commencé à ressentir des courbatures à partir du jeudi soir. Rien de plus.

Le vendredi 6 novembre, nous effectuons un test groupé pour mes filles, ma mère et moi. On vous le confirme, la technique du prélèvement « nasopharyngé » est très désagréable. Le verdict pour ma femme tombe en début de soirée : négatif ! Au-delà du soulagement qu’a procuré cette bonne nouvelle, ce fut surtout la surprise qui dominait, tant nous nous étions préparés à un résultat contraire. L’espoir d’un scénario, à l’épilogue identique pour nous autres, fut vite éteint lorsque ma mère a ressenti les premières nausées, puis vomi le samedi soir… Nos craintes ont été confirmées le dimanche 8 novembre, pour ma mère et moi, puis le lundi 10, pour les filles. Positifs tous les quatre.

L’Agence régionale de santé nous a rapidement contactés pour mener son enquête de traçage et nous prodiguer les conseils de vigilance. Il n’a pas été possible de déterminer avec certitude l’origine de la contamination. Et pour bien réaliser à quel point ce virus est fourbe, vicieux et perturbant, il suffit d’observer la diversité de ses symptômes et la manière dont il affecte ses hôtes.

Ma plus jeune fille n’a développé aucun trouble, pas même un éternuement. Sa grande sœur, qui a l’habitude de nous faire 2 à 3 bronchites asthmatiformes chaque année, n’a finalement eu qu’une grosse fatigue le lundi, suivie de la perte de l’odorat pendant toute la semaine. Ma mère a cumulé fatigue, toux et nausées. Heureusement, sa saturation (taux d’oxygène contenu dans les globules rouges après leur passage dans les poumons) et sa tension artérielle étaient normales. Quant à moi, j’ai souffert de courbatures aux jambes et au dos et perdu le goût et l’odorat. Au final, personne n’a eu de fièvre, ni de mal de gorge, ni de mal de tête, ni de nez qui coule.

Et comble de l’ironie, mon épouse qui est passée du stade de « positive présumée » à « cas contact » avéré, a été secondée par la benjamine pour jouer les infirmières auprès de ma mère, mon autre fille et moi. Un grand merci à toutes les deux pour leur implication et leur patience.

Nous pouvons donc nous estimer heureux, car personne n’a développé de forme grave ni gardé de séquelles physiques ou psychiques sévères. Le traitement aux antibiotiques visant à prévenir une inflammation des poumons, a été efficace et, après 10 jours d’isolement strict, nous pouvons désormais reprendre une vie de famille à peu près normale. « À peu près », car mon épouse, qui a dû refaire un test une semaine après nous, lequel s’est révélé à nouveau négatif, doit encore patienter et effectuer un troisième et dernier test pour lever tout doute et reprendre le travail. Quand je vous dis que ce virus est vraiment spécial.

Sans vouloir jouer les moralisateurs, dites-vous que cela n’arrive pas qu’aux autres. Nous avons vécu les premiers jours de la maladie dans l’angoisse de voir l’état de santé de ma mère empirer et de devoir l’hospitaliser. Aujourd’hui, elle sort quotidiennement pour marcher autour de la maison, se dégourdir les jambes et prendre l’air. Hélas, de nombreuses familles n’ont pas eu cette chance. Restons sur nos gardes, protégez-vous, protégez les autres.

Au fait, le troisième test de mon épouse est aussi négatif.

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Vous êtes-vous déjà demandé quel était le titre original de chaque film que vous avez regardé ? Que vous soyez littéraires, traducteurs, interprètes, cinéphiles avertis ou bien simples curieux, quelle a été votre surprise de constater que les distributeurs se sont octroyé quelques libertés lors de la traduction de l’anglais vers le français !? Et cela ne date pas d’aujourd’hui ! Souvenez-vous du film North by Northwest, d’Alfred Hitchcock, sorti en 1959 et que l’on peut aisément traduire par Nord Nord-Ouest. Non ? Cela ne vous revient pas ? Mais si, faites un effort ! Il y eut cette scène mémorable où Cary Grant est poursuivi puis survolé de très près par petit avion dans un champ. Eh oui, ce classique du suspense hollywoodien est plus communément connu sous le titre de La Mort aux trousses. Je vous l’accorde, c’est un poil plus « accrocheur » qu’un banal point cardinal. Et il est vrai que Cary Grant et Eva Marie Saint flirtent plusieurs fois avec la mort au cours de leurs péripéties. Je vous rassure : Les Oiseaux (Birds), Psychose (Psycho) et L’Homme qui en savait trop (The Man Who Knew Too Much) sont restés fidèles aux titres originaux.

Dix ans après La Mort aux trousses, c’est Henry Hathaway qui signe True Grit (Le Vrai courage). Le titre français 100 dollars pour un shérif évoque bien l’intrigue du film à un détail près :  la jeune Matty Ross (Kim Darby) qui souhaite venger la mort de son père, assassiné, engage un représentant de la loi, Rooster Cogburn, incarné par John Wayne pour accomplir cette tâche. Sauf que ce dernier n’est pas shérif mais marshal… On peut se demander si les distributeurs français ont bien vu le film avant de décider du titre.

Si l’on veut trouver un titre plus explicite encore, je pense que Morgan Stewart’s Coming Home (littéralement Morgan Stewart rentre à la maison), de Paul Aaron, est LA référence. Cette comédie sortie en 1987, raconte les désillusions de Morgan, un collégien rappelé au domicile familial afin de « booster » la campagne électorale de son père. Si le titre original nous plante le décor, sa traduction française va carrément « divulgâcher » (spoiler pour les fans de séries) puisque cela donne : Qu’il est dur d’être farceur, d’aimer la musique pop et les films d’horreur quand on a un père qui se présente aux élections. Non vous ne rêvez pas ! Allez faire tenir ça sur l’affiche ou le ticket de cinéma !

Parfois, c’est une question de point de vue qui diffère de chaque côté de l’Atlantique. Même si Michael Cimino a souhaité évoquer les atrocités de la guerre du Vietnam et ses conséquences sur ses protagonistes (on retrouve, entre autres, dans le casting Robert de Niro, Meryl Streep et Christopher Walken), il a choisi d’intituler son film The Deer Hunter (Le Chasseur de cerf). En effet avant d’être incorporés, les trois amis avaient l’habitude de chasser le cerf. Rien à voir, avec l’enfer qui les attendait. C’est sans doute pour cela que la version française s’appelle Voyage au bout de l’enfer. Pas d’ambiguïté possible ici.

Surfer sur la vague du succès d’un autre film est aussi une source d’inspiration pour les distributeurs. Avec, cependant, une réussite relative. Prenez Le Flic de Beverly Hills (Beverly Hills Cop) de Martin Brest, avec Eddy Murphy et sorti en 1984. L’engouement du public pour les frasques de l’inspecteur Axel Foley fut tel, que les producteurs en firent deux suites (en 1987 et en 1994). En 1997, le réalisateur Thomas Carter fait donc aussi appel à Eddy Murphy, alors au sommet de sa popularité, pour incarner un négociateur de la police de San Francisco dans le film Metro, en référence, sans doute à l’une des principales scènes d’action qui se déroule à bord d’un tramway de la ville californienne. En France, on avait déjà eu Subway, de Luc Besson, et que les Américains ont traduit par…Subway. Il aurait été donc logique de garder Métro pour le film de T. Carter. Au lieu de cela, les distributeurs français ont préféré Le Flic de San Francisco. Ça ne vous rappelle rien ? Au final, pas de record au box-office, pas plus en France qu’aux États-Unis. Est-ce qu’un Flic de Beverly Hills 4 aurait été plus vendeur ? Nul ne le sait.

En revanche, parmi les nombreuses sagas cinématographiques qui ont su tirer leur épingle du jeu, citons celle des Die Hard (Dur à cuire, dans le texte) qui totalise cinq opus entre 1988 et 2013. Quinze ans durant lesquels Bruce Willis, alias le lieutenant John Mc Lane, a d’abord combattu des preneurs d’otages dans un gratte-ciel comparé à un Piège de cristal (pour le premier Die Hard de John Mc Tiernan), puis eu 58 minutes pour vivre (Die Hard 2 : Die Harder, de Renny Harlin) et sauver plusieurs avions de la catastrophe. Dans Die Hard with A Vengeance, de John Mc Tiernan (que l’on aurait pu traduire par Dur à cuire avec une vengeance) Bruce Willis s’associe malgré lui à Samuel L. Jackson lors d’Une Journée en enfer pour empêcher une série d’attaques à New York. Les distributeurs français lui offrent un Retour en enfer pour le quatrième volet : Live Free or Die Hard (littéralement Vis libre ou crève), de Len Wiseman. Avouez qu’on est à la limite de l’acharnement. On pourrait craindre que dans l’épilogue A Good Day to Die Hard, de John Moore, retranscrit – enfin ! – à l’identique par Une Belle Journée pour mourir, l’heure serait venue de tirer sa révérence pour notre infatigable empêcheur de tourner en rond. Pour ceux qui ne l’ont pas encore vu, je vous laisse vérifier si sa réputation de dur à cuire s’est confirmée.

Encore plus surprenant, lorsque des films sont traduits de l’anglais…vers l’anglais. Vous croyiez que Very bad trip, de Todd Philips, était le titre original ? C’eût été logique, me diriez-vous, compte tenu de l’état dans lequel Bradley Cooper et ses acolytes se réveillent, après leur folle nuit. On dit bien « faire un mauvais trip » dans le cas d’une prise de drogues hallucinogènes. Pourtant, le titre initial aurait très bien fait l’affaire, puisque The Hangover signifie la gueule de bois. Sans doute les distributeurs français n’avaient-ils pas les idées très claires, eux non plus.

Certains titres de films sont intouchables, souvent parce que leurs auteurs l’exigent. C’est le cas, par exemple, de la saga au succès planétaire de George Lucas, Star Wars, dont les titres ont été scrupuleusement traduits à l’identique de la version américaine (d’Un nouvel espoir pour A New Hope jusqu’à L’Ascension de Skywalker pour The Rise of Skywalker). À une exception près et de taille : Star Wars aurait dû être traduit par Les guerres de l’étoile et non La guerre des étoiles. Sans doute encore une histoire de sonorité, mais non attestée officiellement. Et vous, quel aurait été votre choix ?

Même traitement de faveur pour la série des James Bond. Pas de fantaisie ni d’excès, dans la pure tradition britannique.

C’est comme si le spectateur ne pouvait pas comprendre le sens d’un titre et qu’on avait besoin de l’infantiliser. À ce propos, pensez-vous qu’un enfant français aurait plus de mal qu’un enfant norvégien ou québécois à faire le lien entre les mots gel ou gelée et une héroïne de dessin animé, capable de transformer tout ce qu’elle touche en glace ? C’est pourtant les titres qui ont été choisis en Scandinavie et au Québec pour traduire Frozen, alias La Reine des neiges. Enfin, cela aurait pu être pire : ont-ils pensé à Gelée royale ou bien La Glacière ? OK, j’arrête de délirer, ou plutôt j’arrête mon « mauvais trip ».

Je ne pouvais conclure sans rendre hommage à nos cousins québécois qui transigent beaucoup moins que nous dans leurs traductions, en conservant, quasi systématiquement, le sens original des titres des œuvres étrangères. On les connaît pour être parfois plus francophones et francophiles que les Français eux-mêmes. Je l’admets, le résultat n’est pas toujours des plus heureux, mais qu’importe, il s’agit du respect du travail de l’auteur. Pensez-y à l’occasion de votre prochaine sortie cinéma.

*Le titre original des Dents de de la mer de Steven Spielberg est Jaws (littéralement « Mâchoires » en anglais).

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Nous avons eu « l’encéphalopathie spongiforme bovine » ou « maladie de la vache folle » pour définir une pathologie mortelle, puis les « armes de destruction massive » pour cautionner une guerre tout aussi destructive, les « subprimes » et le « triple A » pour illustrer une crise financière et ses répercussions. Chaque événement majeur nous fait découvrir des termes méconnus par la plupart d’entre nous. Si certains existaient déjà, d’autres ont été inventés pour l’occasion, avec plus ou moins d’originalité. Le but étant « d’essayer » de rendre le plus compréhensible possible des notions complexes, confidentielles et le plus souvent anxiogènes. Une chose est sûre : ça marche car ça marque les esprits des profanes que nous sommes.

La crise sanitaire du Coronavirus (ou COVID-19 pour les scientifiques) en est malheureusement le dernier exemple. Son nom n’a rien à voir avec la bière préférée d’un ancien président de la République, ni même avec un groupe de techno-dance des années 90. Le nom « coronavirus », du latin signifiant « virus à couronne » est dû à sa forme particulière imitant la couronne solaire.

De « simple grippe », il y a quelques mois, à « pandémie mondiale » aujourd’hui, le vocabulaire autour de ce fléau n’a cessé de s’enrichir, répété jour après jour, heure après heure dans les médias. Désormais, nous savons à quoi ressemble un pangolin mais nous n’aimerions sûrement pas en connaître le goût. Nous savons que faire partie d’un « cluster » aura pour conséquence une mise en «quatorzaine». Vous avez du diabète ou bien vous êtes en surpoids ? Soyez encore plus vigilants face au virus car ce sont des facteurs de « comorbidité ».

Nous avions notre «zone de confort» mais nous appliquons plus volontiers la « distanciation sociale ». Nous avions une pratique individuelle et différenciée de l’hygiène, maintenant ce sont les « gestes barrières » pour tous! Et que dire du «confinement», que l’on croyait réservé à Tchernobyl ou Fukushima ?! Ce mot a cristallisé toutes les peurs et exacerbé tous les fantasmes. Rayons dévalisés par crainte de pénurie, méfiance envers son voisin soupçonné d’être contaminé, diffusion de théories complotistes en tout genre, défiance envers nos gouvernants : c’est fou comme un simple mot peut déclencher des réactions déraisonnées chez certains.

L’inverse est heureusement vrai puisque l’on a redécouvert tout le sens des mots « solidarité », «engagement », « reconnaissance », mais aussi « télétravail ». Nous avons pris conscience de l’importance des «héros de l’ombre», ces «petites mains» tellement utiles à notre société, mais hélas trop peu valorisées en temps «normal». Cette normalité, parlons-en ! Va-t-elle devenir un mot du passé à mesure que le « déconfinement » – terme créé pour l’occasion – va se mettre en place sur le territoire ? C’est évident que rien ne sera plus comme avant tant qu’un remède fiable ou un vaccin n’aura pas été trouvé.

Il ne tient qu’à nous de respecter les recommandations sanitaires afin d’éviter l’apparition d’un nouveau mot (et nouveau mal ?) : le « re-confinement ». Avouez que l’on pourrait s’en passer, non ?